Rappeuse émergente de 21 ans, Nanor a passé toute son enfance à Paris avant de déménager à Montpellier à l’âge de 19 ans. Elle nous raconte son parcours du basket au rap, en passant par l’écriture et la sortie de son premier EP Elmiah ¥01h01.
D’où vient le nom Nanor ?
Nanor est mon surnom depuis que je suis petite. Parce que j’ai mon prénom, Eléanore, est assez long. Quand et comment as-tu découvert le rap ?
La culture hip hop et le rap, je les ai découverts toute jeune grâce à mes grands frères. Que ce soient des sons américains ou français, je leur dois tout !
Tu as sorti ton Premier clip Radio « Tempo – Nanor 1 » en janvier 2021. Y’a-t-il eu un événement particulier qui t’a poussé à te lancer ?
Musicalement parlant, je voulais me lancer, mais comment ? Ça, je n’en avais aucune idée, zéro plan vraiment. Jusqu’à ce qu’il y ait un caméraman qui me propose de me clipper en postant un commentaire sous l’un de mes freestyles. Et grâce à lui, j’ai eu mon premier clip. C’est ça qui est beau, même si je ne savais ni comment ni quoi faire, on m’a tendu la main.
As-tu reçu une éducation musicale ?
Je n’ai pas reçu d’éducation musicale, je me suis faite seule. Depuis que j’ai déménagé, j’ai vraiment commencé à écrire tout et rien.
Quel·les ont été tes rôles modèles en grandissant ?
En vrai, je n’en ai pas forcément eu. J’écoute de tout et j’avoue que j’apprends de n’importe quel artiste ou du moins j’essaie. À la base, j’étais à fond dans le basket-ball, je voulais devenir pro, mais j’ai eu beaucoup trop de problèmes d’un coup et j’ai dû abandonner.
Est-ce que tu écrivais-tu déjà avant de rapper ?
Avant, je n’écrivais pas du tout, je faisais des reprises de sons que j’aimais bien mais c’était catastrophique. Du coup, je n’ai jamais voulu explorer plus loin. Finalement, quand j’ai commencé à écrire sérieusement, là j’ai kiffé ! Je me sens mieux quand je fais de la musique, car je sais ce que je vaux aujourd’hui.
En novembre 2021, tu as sorti ton premier EP de 8 morceaux intitulé Elmiah ¥01h01. Que signifie ce titre et comment est né ce projet ?
Elmiah ¥01h01, mon 1er EP, fait référence aux heures miroirs. On va dire que quand j’étais seule, je ne l’étais pas vraiment car j’avais la musique et j’essayais d’apprendre à droite et à gauche. Mon frère, qui d’ailleurs est artiste lui aussi, m’a parlé des heures miroirs et j’ai trouvé ça archi intriguant ! Vous devriez aller voir !
Et l’heure 01h01 fait référence à un ange du nom de Elmiah. Je suis tombée énormément de fois sur cette heure-ci, et je l’ai choisi pour cet EP car j’ai créé tous les sons vers 01h01 du matin jusqu’à pas d’heure. L’EP est né tout naturellement, j’avais beaucoup de sons et comme je n’avais pas le temps de les clipper, au lieu de les laisser dormir, j’en ai fait un classement qualitatif pour permettre une bonne écoute à tous.
As-tu une équipe (beatmaking, production…) qui t’accompagne ?
Non, je ne suis accompagnée de personne, je fais ça avec des prods YouTube. Je n’ai pas de beatmaker mais si vous en avez un à me présenter pourquoi pas ahah ! Je remonte souvent à Paris pour enregistrer mes morceaux au studio.
Quel est le morceau dont tu es la plus fière à ce jour ?
Le morceau dont je suis le plus fière est « Encore un peu » sur mon EP Elmiah ¥01h01. Il a représenté une grande étape dans ma vie. Et c’était la 1ère fois que je parlais librement de « l’amour ». Une longue relation que j’ai eue avec une fille.
Comment définirais-tu ta musique et ton univers à des personnes qui ne te connaissent pas ?
En termes musicaux, je dirais qu’on peut facilement se reconnaître dans mes sons car je parle de tout : des épreuves, pour ceux qui en ont eu, et du vécu, qu’il soit familial ou amoureux.
Quelles sont tes autres activités en dehors du rap ?
Franchement, en ce moment je n’en ai plus, j’ai arrêté de faire du basket. Sinon à part ça, sortir avec mes potes tranquille.
Est-ce que le rap est ton métier aujourd’hui ? Si non, est-ce un objectif à terme ?
Non le rap n’est pas encore mon métier, mais j’aimerais bien. C’est ça mon objectif, faire découvrir ma musique à tout le monde !
Quels sont tes projets à venir ?
Sûrement un nouvel EP, et quelques clips aussi.
Que penses-tu de Madame Rap ? Des choses à changer/améliorer ?
Pour ma part, je trouve que c’est un très bon média. J’aime le fait que toutes les femmes soient diffusées, ça permet de connaître d’autres univers musicaux. Merci à vous pour ça !!
Rappeuse et chanteuse togolaise, Chelsea se définit comme une « artiste de la chanson. » Active depuis les années 2010, elle met la musique entre parenthèses en 2016 pour terminer ses études en management des ressources humaines. Après un premier retour en 2020, elle sort début 2022 le clip « JVPF (Je vais pas faire) » qui célèbre l’acceptation de soi. Chelsea nous parle de ses projets, de son écriture cathartique et des difficultés que les rappeuses doivent affronter au Togo.
Ton père était poète et jouait un peu de guitare. Quelle place la musique occupait-elle dans ta famille ?
Je n’ai pas pris de cours de musique mais la musique occupait une place très importante dans ma famille. Mon père, ma mère et mon frère, écoutaient tous de la musique et mes oreilles passaient de Ray Charles à Tupac, puis EVE, Booba ou Bob Marley. Il y avait un peu de tout, du coup j’ai eu beaucoup d’influences musicales.
J’étais aussi membre d’un club d’enfants qui s’appelle À Nous La Planète, animé par et pour les enfants, qui était diffusé sur la première chaîne nationale togolaise. On faisait des émissions, des enregistrements en studio, des interviews et même des concerts. Donc depuis toujours, la musique a une place très importante dans ma vie.
Tu as commencé à écrire des textes à l’âge de 9 ans. Quel a été le déclic et de quoi parlaient ces textes ?
Les textes n’étaient pas aussi censés que ça dans la mesure où j’écrivais pour amuser la galerie et mes camarades de classe. Dès qu’une chanson sortait, je reprenais les mélodies et je mettais des conneries dessus ! Mais quelques années après, à l’adolescence, je me suis mise à écrire de vrais textes.
À 12 ans, j’ai perdu mon père et ça a été un événement très douloureux pour moi parce que je n’avais personne dans mon entourage qui avait vécu la même expérience et à qui je pouvais en parler. Comme j’étais toute seule et que je pleurais à l’intérieur de moi, un des amis de mon père m’a conseillé de mettre tout de ce que je ressentais par écrit. Et c’est comme ça que j’ai commencé à écrire.
Tu as découvert le rap à l’âge de 12 ans. Est-ce que tu te souviens du premier morceau que tu as écouté et de ce que tu as ressenti à ce moment-là ?
Je ne me rappelle pas du premier morceau, mais celle qui m’a poussé à écrire des textes de rap, c’est Diam’s. Avant elle, j’écoutais déjà des rappeuses comme EVE, qui passait sur la chaîne Trace TV, mais je ne savais pas que les femmes pouvaient rapper en français.
Le rap français féminin, je l’ai découvert via Diam’s, justement à l’époque où je venais de perdre mon père. Je me suis rendu compte que je pouvais beaucoup plus exprimer ce que je ressentais à travers le rap que dans des textes de R&B.
Est-ce que tu avais des rôles modèles en grandissant ?
Côté style vestimentaire, l’actrice et DJ Ruby Rose. Côté musique en revanche, je ne suis pas sûre de pouvoir donner un nom parce que je suis très ouverte. J’écoute vraiment de tout, du rap, du jazz, du zouk, de la country, du disco…
Tu as rencontré le beatmaker Elliott quand tu étais au lycée. Est-ce que vous collaborez toujours ensemble aujourd’hui ? Est-ce qu’il y a une équipe de producteurs, manageurs ou autres qui t’accompagne ?
On est en bon termes et on est toujours en contact mais je n’ai pas collaboré avec lui sur mes projets récents. Côté équipe, j’ai une manageuse et une chargée de com, mais pas de producteur pour le moment.
En 2016, tu as créé le projet de cypher Femmes Leaders avec plusieurs rappeuses togolaises et africaines. Est-ce que tu peux nous expliquer en quoi consistait cette initiative et les raisons qui t’ont amené à la lancer ?
En effet, c’était un cypher qui devait être suivi d’un concert. Le but était de mettre en avant les artistes féminines au Togo. Ensuite, on a remarqué que le courant passait bien entre nous, les filles en studio. On s’est dit « pourquoi ne pas faire une autre chanson ? » et après une autre, et encore une autre, et du coup on a fait un album. Malheureusement, il n’est jamais sorti mais on a sorti plusieurs singles qui ont été clippés et on a participé à de nombreux festivals et scènes. En tout cas, c’était une très belle aventure, qui nous a permis de mettre en avant la gent féminine dans le domaine musicale.
D’après toi, quelles sont les principales difficultés auxquelles les rappeuses sont confrontées au Togo ?
D’abord, je dirais le manque de soutien. On n’a pas vraiment de personnes et de producteurs qui s’intéressent à nous. La plupart des rappeuses manquent d’authenticité dans le sens où même quand on a une équipe, elle veut nous formater. Forcément il faut qu’on ressemble à unetelle ou unetelle et finalement, il n’y a pas de valeur ajoutée.
Est-ce que tu te définis comme féministe ?
Je ne dirais pas que je suis féministe jusqu’au bout, mais je suis pour l’équité de façon générale, dans tous les domaines.
Toujours en 2016, tu as décidé de mettre la musique entre parenthèses le temps de terminer tes études en management des ressources humaines. Maintenant que tu es diplômée, qu’est-ce que cette formation universitaire t’apporte en tant qu’artiste ?
Je pense que l’éducation est toujours une très bonne chose et permet de raisonner différemment. Ça m’a appris à bien écrire mes textes. Comme je n’ai pas de producteur, je finance tout ce que je fais. Cette formation m’a aussi permis d’avoir de l’expérience en entreprise et des sous pour pouvoir financer ma musique.
Tu es revenue en mai 2020 avec « JTB je t’ai bloqué », titre chanté et assez R&B. Est-ce que tu as le même rapport au rap et au chant ? Est-ce que ce sont deux activités très liées pour toi ou assez différentes ?
Quand j’écris une chanson, je sais déjà si je vais rapper ou chanter. Je m’inspire beaucoup des beats pour composer et quand les mélodies me viennent, je sais déjà si ce sera du rap ou du chant. Pour moi, les deux sont très liés. J’aime toujours garder mon côté rap même quand je chante.
D’ailleurs, « JTB », n’est pas de la kizomba pure. On sent que c’est une rappeuse qui fait ça et c’est plutôt adapté à tout le monde. Même si vous n’aimez pas le zouk, vous pouvez aimer « JTB ».
Début 2022, tu as sorti le clip « JVPF Je vais pas faire » qui est une ode à l’acceptation de soi. Tu parles notamment du fait qu’on te reproche souvent d’être androgyne. Est-ce que tu peux nous expliquer ?
Ici en Afrique, en tout cas au Togo, on dit que la plupart des rappeuses sont plutôt masculines. Alors, on me fait souvent des remarques du genre « tu vois les Nicki Minaj et les Cardi B, pourquoi tu ne ferais pas comme ça ? C’est sexy, c’est commercial, c’est plus acceptable. Avec ça, tu vas beaucoup plus te faire remarquer. »
À un moment de ma vie, en grandissant, je me suis dit « ça suffit, il faut que je sois moi-même, à l’aise, bien dans ma peau pour pouvoir véritablement exprimer mon art. » Donc voilà l’histoire de « JVPF ».
Aujourd’hui, quelles sont tes autres activités en dehors du rap ?
Je n’aime pas donner trop de détails mais je travaille dans une entreprise dans le domaine financier.
Est-ce que le rap est ton métier à part entière ? Si non, est-ce un objectif à terme ?
Je vais voir ce que l’avenir me réserve, mais ce que je peux vous promettre, c’est que je ne vais pas lâcher la musique. Parce que même quand j’ai voulu lâcher, je n’ai pas pu dans le sens où c’est vraiment lié à moi. Je ne peux pas vivre sans. Même si j’ai un boulot à côté, la musique fera toujours partie de moi donc vous aurez de mes nouvelles tant que c’est possible. Quels sont tes projets à venir ?
J’ai déjà enregistré des chansons qui sont en studio. Après « JVPF », je prévois de sortir d’autres singles. Abonnez-vous donc à mes différentes comptes sur les réseaux pour être informé·es à temps !
Est-ce que tu connaissais déjà Madame Rap avant cette interview ? Si oui, qu’en penses-tu ? Est-ce que tu vois des choses à changer ou à améliorer ?
Oui bien sûr, je connaissais Madame Rap depuis quelques années déjà. Il faut savoir que j’écoute beaucoup de rap féminin et je fais pas mal de recherches, et c’est comme ça que j’ai découvert Madame Rap. Et grâce à vous, j’ai découvert d’autres rappeuses, ce qui est plutôt intéressant.
Je pense que Madame Rap est la référence quand il s’agit de rap féminin, quand on veut découvrir au-delà de ce que les médias nous proposent. En tout cas moi j’adore !
Découvrez notre podcast Madame Talk avec la rappeuse ivoirienne Andy S !
Rappeuse ivoirienne de 24 ans, Andy S se fait connaître en 2017 avec le titre « Cotisez », qui rencontre un énorme succès à Abidjan.
Andréa Sahouin, de son vrai nom, grandit avec une mère journaliste et un frère aîné aujourd’hui chanteur. Adolescente, elle se passionne d’abord pour le foot et le basket mais abandonne le sport l’année de son bac pour se consacrer à ses études. Elle écoute alors beaucoup de rap, dont Booba et Sexion d’Assaut, et commence à rapper à la sortie des cours. Elle se fait rapidement remarquer lors de freestyles de rue et se lance véritablement dans la musique après le lycée.
En 2019, celle que l’on surnomme Pépita ou King Pépita sort son premier EP Le rap n’a pas de sexe, puis le mini EP RDBQ Vol. 1 en janvier 2021. Artiste indépendante, elle milite depuis ses débuts pour que l’attention du public et des professionnels se porte avant tout sur sa musique et non sur son genre. Elle dénonce également la rivalité entre rappeuses et l’appellation « rap féminin » pour proposer une musique universelle, inclusive et hors catégorie.
En novembre 2021, Andy S sort la mixtape Exousia et se produit pour la première fois en France. Aujourd’hui de retour à Paris pour plusieurs concerts, elle nous parle de drill, de rap ivoire, de son rapport à l’écriture et des questions qui l’agacent en interview.
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