Rappeuse, chanteuse et autrice-compositrice, Tkay Maidza est née à Harare au Zimbabwe, a grandi à Adélaïde en Australie, et vit aujourd’hui à Los Angeles. En tournée jusqu’à la fin de l’année, l’artiste nous parle de son parcours de « caméléon » et de son deuxième album Sweet Justice qui sortira le 3 novembre.
Comment et quand as-tu découvert le hip hop pour la première fois ?
J’y ai été initiée quand j’avais environ 3 ans. Mes parents écoutaient beaucoup Missy Elliott, mais j’ai vraiment commencé à y prêter attention quand Nicki Minaj a sorti sa première mixtape. J’ai eu l’impression qu’elle me parlait vraiment à ce moment-là.
Tu es rappeuse, chanteuse et autrice compositrice. Quelle pratique est venue en premier ?
J’ai d’abord commencé en tant que rappeuse. Je me suis mise au chant parce que je cherchais quelqu’un pour chanter mes refrains et que je ne connaissais personne.
Comment et quand as-tu créé le personnage de Tkay Maidza et comment le définirais-tu ?
C’est une extension de moi. Ce n’est pas tant un personnage qu’une manifestation de la version ultime de moi-même. Une personne que l’enfant que j’étais admirerait.
Le 3 novembre prochain sort ton deuxième album Sweet Justice. Comment ta musique a-t-elle évolué depuis ton premier projet ?
J’ai l’impression de définir mes objectifs et de faire de la musique que j’aime aujourd’hui. Je parle de ma vraie vie au lieu d’inventer des scénarios. C’est plus facile de s’y identifier.
Quelle est la chanson qui te représente le mieux et pourquoi ?
« What Ya Know » de mon nouvel album ou « 24k ». C’est un mélange de toutes les versions de moi : le chant, le rap, l’introspection mais aussi la confiance.
Comment écris-tu habituellement ? As-tu des routines ?
Pas vraiment. J’essaie juste d’écrire toutes ce qui me passe par la tête et de laisser le flot de ma conscience s’exprimer. Parfois, c’est juste un poème. D’autres fois, ce sont des mélodies.
Tu es née au Zimbabwe, puis tu as déménagé en Australie, et tu vis maintenant à Los Angeles. Quelle est ta relation à ces trois endroits ?
J’ai appris que je pouvais être un caméléon et emprunter de petits éléments de chaque endroit où je vivais. Ce qui compte, c’est la façon dont je me sens dans une ville et non le fait que j’y appartienne ou pas.
En tant que femme artiste, quels sont les problèmes auxquels tu as dû faire face tout au cours de ta carrière ?
Je pense qu’on ne nous prend parfois pas au sérieux… Il faut en faire beaucoup pour que les gens, surtout les hommes, nous entendent et nous voient.
Te considères-tu comme féministe ?
Oui, je crois que les femmes doivent pouvoir s’exprimer et être entendues. Je suis pour l’équité entre les sexes et je pense que les femmes sont sous-estimées, alors j’essaie de faire de mon mieux pour être un bon exemple de femme forte.
Quel a été l’impact de la pandémie de Covid sur tes projets ?
Cela n’a pas vraiment arrêté quoi que ce soit pour moi. J’ai été coincée en Australie pendant un moment, mais j’avais vraiment besoin de ce temps d’arrêt pour réaliser que je devais déménager de chez mes parents et voler de mes propres ailes.
Tu es actuellement en tournée nord-américaine. Prévois-tu également de venir en Europe ?
Oui, j’y serai en novembre.
Que penses-tu de Madame Rap ? Qu’est-ce qui devrait être changé ou amélioré ?
Vous êtes formidables ! Merci de m’avoir donné l’occasion d’échanger avec vous.
Découvrez notre sélection de 20 rappeuses pionnières actives avant 1990 !
Systématiquement effacées de l’histoire du hip hop, les rappeuses ont pourtant toujours été présentes dans ce mouvement depuis son émergence à la fin des années 1970. MCs, autrices, mais aussi parfois productrices et activistes, les femmes ont participé activement à faire du rap ce qu’il est aujourd’hui : une musique inclusive, plurielle, innovante, ancrée dans son époque et en perpétuelle évolution.
Afin de visibiliser ces artistes, voici une sélection non-exhaustive de 20 rappeuses pionnières actives avant 1990 et une playlist à (re)découvrir ici.
Avec :
The Sequence – Funk You Up (1979)
Columbia, Caroline du Sud, États-Unis
Lady B – To The Beat Y’all (1979)
Philadelphie, États-Unis
Sha-Rock – Rappin and Rockin the House Live with The Funky 4+1 at NYC’s The Kitchen (1980)
Bronx, New York, États-Unis
Lisa Lee – Wild Style Deletes Scenes (1980)
Bronx, New York, États-Unis
Debbie D – Us Girls Can Boogie Too ft. Sha-Rock & Lisa Lee (1984)
Bronx, New York, États-Unis
Classy Crew – Peter King Nitelife CFCF 12 Montreal (1983)
Québec, Canada
Roxanne Shante – Roxanne’s Revenge (1984)
Queens, New York, États-Unis
Pebblee Poo – A Fly Guy (1985)
Bronx, New York, États-Unis
Freaky D – Time Is Up / Beep Rap (1986)
Montréal, Québec, Canada
MC Lyte – Paper Thin (1988)
Brooklyn, New York, États-Unis
Real Roxanne – Respect (1988)
Brooklyn, New York, États-Unis
JJ Fad – Supersonic (1988)
Rialto, Californie, États-Unis
Oaktown 3-5-7 – Juicy Gotcha Krazy (1988)
Oakland, Californie, États-Unis
Queen Latifah & Movie Love – Ladies First (1989)
Newark, New Jersey, États-Unis/Battersea, Londres, Royaume-Uni
Ms Melodie – Live On Stage (1989)
Brooklyn, New York, États-Unis
Nikki D – My Love Is So Raw (The Love Mix) ft. Alyson Williams (1989)
Newark, New Jersey, États-Unis
Wanda Dee – To The Bone (1989)
Bronx, New York, États-Unis
À l’occasion de la Journée internationale de la visibilité de la bisexualité, découvrez notre sélection de 11 rappeurs·euses qui s’identifient comme bisexuel·les !
4 % de la population mondiale se définit comme bisexuelle d’après une enquête IPSOS menée dans 30 pays et parue en juin 2023. Les bi·es seraient 5 % en Espagne, 4,5 % aux États-Unis et 3 % en France. Par ailleurs, aux États-Unis, le nombre de personnes bisexuelles a quasiment quadruplé en dix ans, selon une autre étude de juin 2023 publiée dans The Journal of Sex Research.
Si on ne peut que se réjouir de cette visibilité accrue des personnes bies dans la société, la pop culture, et sur les réseaux sociaux, les artistes hip hop bisexuel·les demeurent toujours peu représenté·es dans les médias traditionnels.
Contrairement au préjugé selon lequel le rap serait un espace ultra hostile aux LGBT+, Madame Rap souhaitait profiter de cette journée pour rappeler que les rappeurs·euses bi·es existaient bel et bien ! Voici donc 11 MCs à connaître, sélectionné·es parmi les 32 artistes qui s’identifient comme bisexuel·les répertorié·es sur notre site.
Née au Venezuela et basée à Miami, DXVA se sent « hors du temps ». Après avoir travaillé à la radio pendant douze ans, elle se lance dans la musique à l’âge de 30 ans, il y a 5 ans. Aujourd’hui rappeuse, chanteuse et compositrice, elle nous parle de son parcours atypique, de l’influence des années 90 sur son art empreint de poésie et de mysticisme et son féminisme.
Tu es rappeuse, chanteuse et compositrice. Es-tu autodidacte ou as-tu reçu une éducation musicale ?
Ma première rencontre avec la musique s’est faite à un très jeune âge. J’ai pris des cours de chorale et de chant lyrique pendant toute mon enfance et mon adolescence et j’ai représenté mon pays dans des festivals internationaux de chorale. Mais à l’âge de 16 ans, j’ai arrêté de chanter. Je n’ai jamais appris à composer, ni à jouer d’un instrument. Je considère que j’ai une aversion pour la musique très empirique, car mes notions dans ce domaine ont toujours été basiques.
Te souviens-tu de la manière et du moment où tu as découvert le hip hop pour la première fois ?
J’ai toujours écouté du rap et du hip hop. J’écoute du rap depuis que je suis petite, mais je suis multigenre en musique. Mes influences musicales sont très larges : culture hip hop américaine, salsa, rock, pop, jazz, musique électronique, merengue des années 90, musique folklorique vénézuélienne…
Travailler à la radio depuis l’âge de 18 ans m’a également ouvert à une grande variété de goûts et de sons, mais le rap était comme un amour interdit parce que c’était le seul genre qui ne passait pas à la radio. C’est peut-être pour ça que j’en écoutais en privé quand j’étais seule, parce que c’était interdit. Donc face à un interdit ou du déni, je suis vent debout comme dirait ma mère.
Dans mon pays, il y a de grands représentants de la culture rap, parmi lesquels Nigga Sibilino, Apache et Canserbero. Mais le premier rappeur que j’ai écouté était Vico C. J’ai également écouté beaucoup de rap américain dans les années 90.
Quand et comment as-tu commencé à rapper ?
J’ai composé ma première chanson en 2019, j’avais 30 ans. À. cette époque, je traversais une phase très compliquée, je dirais même dépressive, par rapport à ma carrière. J’écrivais des textes juste pour m’amuser, tout en « renouant avec ma passion » pour le travail.
À la fin de cette année-là, le rappeur « Chevy Style », qui est un très bon ami, est venu me voir de Madrid et m’a appris la métrique du rap à 3 heures du matin sur une plage. Je me souviens qu’il m’a dit : « DAVA, tu as le flow d’une rappeuse ».
Le lendemain, je me suis réveillée avec un nouvel espoir, celui de créer, d’explorer et de voir si je pouvais vraiment écrire et rapper. J’ai été époustouflée par cette idée et j’ai commencé à écrire et à m’entraîner tous les jours dans ma chambre.
Je me considère comme une artiste libre, et je ne me suis jamais perçue comme une rappeuse. Je respecte beaucoup les rappeurs·euses et la scène hip hop et j’ai toujours été une fidèle adepte.
Ta musique mélange différentes sonorités, allant de l’électro au rap old school, comment la décrirais-tu ?
Ma musique revisite différents genres de musique urbaine. Je trouve ma plus grande force créative dans le rap et le hip hop, mais je fusionne des rythmes électroniques et des éléments de rap rock des années 90.
Mon producteur CHCKN est un artiste qui vient de la musique électronique. Il a réussi à s’approprier le son californien de la côte ouest en le transposant en espagnol de manière très novatrice, en salissant les voix et en apportant des nuances de rap grunge des années 80.
Mais en même temps, une fois que tout est assemblé, les paroles, la structure, le son et la voix, la proposition reste commerciale.
Comment écris-tu en général ? As-tu des sujets de prédilection ou des routines particulières ?
Curieusement, je n’écris que si je me sens très connectée à la source créative, parce que mon alias est DIVINE FLOW. Je respecte beaucoup mon processus de composition, j’écris toujours seule, mais à côté de mon producteur, et souvent sur le beat qu’il est en train de créer à ce moment-là.
Je ne fais pas de freestyle, mais je commence à chercher des mélodies, que je traduis ensuite en couplets. Je pense toujours que la musique est là-haut, dans un nuage, et qu’à un moment donné, je peux la lire et la télécharger. Je me considère comme un canal dans ce sens.
Le morceau « 2090 » rend hommage aux années 90 qui t’ont influencée. Quels étaient tes rôles modèles à cette période ? Qu’est-ce que tu trouves le plus inspirant dans cette époque ?
2090 est précisément un hommage cette époque, à la musique féminine qui m’a nourrie artistiquement. Tous les artistes que je mentionne dans la chanson m’ont inspirée : Snoop Dog, Eminem, Green Day, les Spice Girls, Britney Spears, Madonna, Nirvana, No Doubt, Shakira… Mes plus grandes influences musicales viennent de la musique latine des années 90.
Je dis dans le refrain : « We send the flow back, we pray to the God of the 90’s », un peu en sentant que le Dieu des années 90 répondait à d’autres besoins. Nous étions beaucoup moins hyper connectés, c’était un autre rythme de vie, et je suis heureuse d’avoir vécu cette époque.
En écrivant cette chanson, j’ai ressenti de la nostalgie et du désir, car j’ai parfois l’impression de ne pas correspondre aux tendances du monde d’aujourd’hui.
Le titre « Martina » raconte l’histoire d’une femme qui vole à l’étalage et tue sa propre sœur sans le savoir. Qu’est-ce qui t’a inspiré cette chanson ?
Plus qu’une chanson, Martina est une chronique sans filtre qui raconte un événement à partir d’un point de vue précis. Ça raconte un cauchemar que j’ai fait en 2021, un rêve très lucide.
Je n’ai utilisé que des techniques narratives et des figures rhétoriques telles que la description, les comparaisons, la personnification, la métaphore et les analogies, jusqu’à arriver au dénouement : un crime, malheureusement très banal dans la société latino-américaine, mais aussi rarement raconté. Martina est une erreur qui prive de liberté, brise, sensibilise et fait prendre conscience des meilleurs choix à faire dans la vie, des risques et des malheurs.
Comment décrirais-tu ton propre féminisme ?
Je dirais que mon féminisme est juste, critique, puissant et empathique. Depuis mon enfance, j’ai toujours remis en question les conventions sociales, le mariage, la maternité, la religion. Je suis toujours curieuse, mais je ne me promène pas avec une baguette de juge.
C’est pourquoi j’aime tant la satire, beaucoup de musiques sont écrites sous forme de satires. Cela me permet de mettre l’accent sur les doubles standards et la façon dont nous interagissons.
J’aime donner du pouvoir aux femmes, beaucoup. Mais les hommes aussi, les humains, les animaux, les plantes. Je pense que j’aime donner du pouvoir à la nature. Et pour cela, je dois constamment rompre avec les stéréotypes.
Es-tu en lien avec la scène hip hop vénézuélienne ? Si oui, à quoi ressemblent les scènes meuf et queer là-bas ?
Je ne suis liée à aucune scène en ce moment, je crée ma propre scène. J’ai dû arrêter de regarder constamment ce que faisaient les autres artistes parce que j’ai commencé à remarquer que cela altérait mon art, que je me comparais et que je nourrissais mon insécurité. Maintenant, je me concentre sur ce que je veux proposer.
Quels sont tes projets à venir ?
Mon single « FLOTA » est sorti cet été. C’est une chanson qui parle de mon rapport à l’anxiété, la peur et de ma relation avec certaines exigences de la société, telle que la perte et les émotions limitantes.
Le refrain « Súbete al beat y flota » fait allusion à la façon dont la musique représente ma bouée de sauvetage. Dans la vidéo, DXVA fait face à la peur et à l’anxiété, deux personnages avec lesquels je me bats tout en dansant sur un ring de boxe, comme un adversaire puissant.
Cela représente la lutte interne que peuvent mener de nombreuses personnes, qui pensent qu’il est trop tard pour répondre à leurs attentes, pour apprendre, pour rêver. Ce « combat » représente également la rencontre entre les polarités, l’obscurité et la lumière, la douleur et la beauté, le brut et le subtil.
Que penses-tu de Madame Rap? Des choses à changer/améliorer ?
J’aime qu’il y ait encore des médias qui travaillent si magnifiquement pour l’amour de l’art et de la musique, vous en êtes une représentation. J’aime votre contenu, je le lis toujours. Je vous félicite pour cet excellent travail et je vous remercie d’avoir pensé à moi.
Alors que Madame Rap a fêté ses 8 ans au mois d’août 2023, quoi de mieux pour célébrer cet anniversaire que de lancer une version de son site en espagnol !
Pourquoi l’espagnol ? La dimension internationale est un élément central pour Madame Rap depuis son lancement en 2015. Un site en espagnol, deuxième langue maternelle la plus parlée sur la planète, permet donc de toucher une plus grande partie de la population mondiale.
Nombre de ces artistes, et quelques médias en Espagne, au Chili, et aux États-Unis, où 20 % de la population est d’origine hispanique, soutiennent le projet depuis ses débuts. Il nous semblait donc logique de nous adresser à elles·eux directement dans leur langue.
Pour rappel, Madame Rap est le premier média dédié aux f*mmes et aux LGBT+ dans le hip hop. Fondé à Paris en août 2015, son but est de :
Merci à celles·eux qui suivent/soutiennent/relaient depuis les premiers jours. Continuons de célébrer l’inclusivité du hip hop dans le monde entier et désormais en trois langues !
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