Best of 2018

2019 arrive à grands pas, l’occasion de revenir sur une année très riche et intense pour Madame Rap !

Madame Rap, en 2018 c’est :

  • des interview de rappeuses internationales ;
  • des événements : concerts, cyphers, tables rondes, conférences et débats ;
  • des interviews et des articles dans les médias.

Premier média en France dédié aux femmes dans le hip hop, Madame Rap oeuvre depuis trois ans à mettre en lumière les femmes et les LGBT+ dans le hip hop et à leur rendre la place qu’ils méritent.

En cherchant à ouvrir le hip hop à un public plus vaste et combattre les préjugés, nous visons des objectifs essentiels : densifier les liens sociaux et en créer de nouveaux, faire entendre les voix des femmes et des LGBT+ dans ce mouvement artistique et culturel et donner plus de pouvoir d’action aux personnes les plus éloignées des lieux où celui-ci s’exerce. Entre éducation populaire et lutte pour l’égalité, Madame Rap s’inscrit dans une démarche artistique et humaniste globale, au-delà des clichés et des frontières.

Merci aux artistes pour leur créativité et leur disponibilité, à tous nos partenaires et à vous tou.te.s pour votre soutien !

Et très belle nouvelle année, pleine de hip hop !

VIDÉO – 100 rappeuses de 100 pays différents

Depuis trois ans, Madame Rap s’attache à mettre en lumière les femmes et les LGBT+ actifs sur la scène hip hop internationale. Aujourd’hui, nous répertorions plus de 1400 rappeuses dans le monde entier !

Voici un petit avant-goût avec cette sélection de 100 rappeuses de 100 pays différents. La preuve que le rap est partout et qu’il n’est pas un espace hostile pour les femmes, contrairement à ce que certain.e.s continuent de nous faire croire…

Afghanistan – Ramika
Afrique du Sud – Nadia Nakai
Albanie – Lil Vlora
Algérie – Serly
Allemagne – Lena Stoehrfaktor
Angola – Titica
Arabie Saoudite – Mai Mandour
Argentine – Alika
Arménie – Lil Mak Marialena
Australie – Madame Wu
Bahrein – Miss Moone
Belgique – Simsik l’amazone
Bhoutan – Karma Euden Nobu
Birmanie – Y.A.K.
Bolivie – Nina Uma
Botswana – E’nigma
Brésil – Alt Niss
Bulgarie – D E N A
Burkina Faso – Féenose
Cambodge – Lisha
Cameroun – Mihney
Canada – The Sorority
Chili – Moyenei
Chine – Uranus
Colombie – MC Jana
République du Congo – Lady Do
Corée Du Sud – Shin B
Costa Rica – Nakury Del Patio
Côte D’ivoire – Doksy
Croatie – Remi
Cuba – Danay Suarez
Danemark – Grow Digga
Égypte – EmpresS *1
Équateur – Mc Roja
Espagne – Blondie
États-Unis – Ray LeJune
Éthiopie – Lola Monroe
Fidji – Mc Trey
Finlande – Sini Sabotage
France – Vicky R
Gabon – Tina
Gambie – Awa Bling
Ghana – Karoli Naa
Grèce – Jumping Judas
Guatemala – Rebeca Lane
Guinée – Sister Lessa
Haïti – Doña
Hongrie – MC Ducky
Inde – Hard Kaur
Indonésie – Yacko
Iran – Justina
Irlande – Tanita Sikes
Islande – Cell 7
Israël – Invincible
Italie – Comagatte
Japon – Yurika
Jordanie – MC Meera
Kenya – Nasha Dee
Liban – Malikah Lynn
Libéria – Lady Skeet
Libye – Whezzy
Luxembourg – Mila
Madagascar – Bambs
Malaisie – Hunny Madu
Mali – Assourita
Maroc – Real Blood
Mauritanie – Les filles du bled
Mexique – Afromega
Mozambique – Iveth
Niger – Zara Moussa
Nigéria – Princess Vitarah
Norvège – Myra
Ouganda – Keko
Pakistan – Ash Chughtai
Pays-Bas – Dam Dutchess
Pérou – La Prinz
Philippines – Chill
Pologne – Razy Dwa
Portugal – Capicua
Royaume-Uni – Poetic Pilgrimage
Russie – Big Ma
Rwanda – Ciney
Sénégal – Déesse Major
Serbie – Mimi Mercedez
Singapour – Masia One
Suède – Linda Pira
Suisse – Danitsa
Suriname – Missy D
Swaziland – Kay T
Syrie – Dania DN Closer
Tanzanie – Rosa Ree
Togo – Flash Marley
Tunisie – Crossa
Turquie – Aziza A
Uruguay – Lady Crash
Venezuela – Mestiza
Vietnam – Suboi
Yémen – Amani Yahya
Zambie – Cleo Ice Queen
Zimbabwe – Radiofien

Bethsabée : « Être une femme qui fait tout toute seule est une représentation féministe »

La rappeuse/chanteuse/compositrice de Poitiers Bethsabée nous a parlé de son premier album NUT, des ses influences grime, trap et bass music et de sa vision du féminisme !

Retrouvez Bethsabée sur Facebook, Twitter, Bandcamp et Instagram.

Yugen Blakrok : « C’est un cycle d’inspiration conscient et permanent »

Figure phare du rap sud-africain, Yugen Blakrok nous a parlé de son parcours dans le hip hop, de sa participation à la BO du film Black Panther et de son deuxième album Anima Mysterium qui sortira le 1er février 2019.

Comment as-tu découvert le hip hop et commencé à rapper ?

J’ai découvert le hip hop à la télévision. En Afrique du Sud, beaucoup de programmes américains sont diffuses à la télé. J’ai été attirée par la dimension consciente et militante des années 1990. Mais si je me suis mise au rap c’est parce que je ne savais pas danser.

Ton titre “Opps” figure sur la BO du film Black Panther. Qu’est-ce que cela t’a apporté ?

Cette opportunité m’a permis de rentrer dans le mainstream. Des plateformes qui étaient jusque-là inaccessibles m’ont soudainement ouvert la porte. Cela m’a aussi permis de me faire connaître auprès de gens qui auraient eu du mal à me dénicher auparavant.

Tu as toujours collaboré avec le producteur sud-africain Kanif The Jhatmaster. Comment l’as-tu rencontré et comment travaillez-vous ensemble ?

On s’est rencontré il y a environ neuf ans à un concert de Robo the Technician à Soweto. On fonctionne à l’énergie. La lumière, la réflexion, le son sont des ondes et c’est ça qui nous anime, ces fréquences qui nous font vibrer. La vibe fait tout. J’ai travaillé et continue de collaborer avec d’autres producteurs mais notre alchimie perdure. Parfois, les beats influent sur les paroles et d’autres fois, les paroles dictent au beat la direction à prendre, c’est un cycle d’inspiration conscient et permanent.

Ton deuxième album Anima Mysterium sort le 1er février 2019. À quoi devons-nous nous attendre ?

Attendez-vous à un univers sombre fait de mots et de sons. Des paroles denses et une prod complexe.

Tu es active sur la scène hip hop sud-africaine depuis plus de dix ans. Quelle place les femmes occupant-elles sur cette scène ?

Nous sommes nombreuses. Je crois que l’on se fout pas mal de savoir comment nous sommes perçues.

Te définis-tu comme féministe ?

Je crois que je suis plus womaniste (concept créé par Alice Walker en 1983 qui, pour résumer, désigne les afro-féministes et les féministes non-blanches).

Quelles sont les femmes, connues ou pas, qui t’inspirent ?

Je n’ai pas de rôles modèles, mais j’admire certaines qualités chez les gens. La ténacité, la force, la conviction et l’authenticité sont des vertus qui m’attirent chez les femmes. Dans mon cheminement en particulier, je me suis rendu compte que ces qualités me permettaient de me tirer des situations les plus difficiles alors j’ai des affinités avec les femmes qui présentent ces caractéristiques, quel que soit leur domaine. J’ai eu la chance de rencontrer de nombreuses femmes dotées de ces qualités.

Quels sont tes projets à venir ?

Mon deuxième album Anima Mysterium qui sortira en février chez IOT Records. J’ai aussi fait quelques featurings sur des albums qui sortiront en 2019. Tendez l’oreille.

Que penses-tu de Madame Rap ?  Des choses à changer/améliorer ? 

C’est une plateforme super et inclusive, surtout pour le hip hop. Le fait de Madame Rap se concentre sur des groupes marginalisés est non seulement bienvenu, mais aussi rafraîchissant.

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Sara Hebe : « Je renforce et étends la lutte féministe »

La rappeuse argentine Sara Hebe nous a parlé de résistance politique, de féminisme et de son quatrième album qui sortira en février 2019. 

Quand et comment as-tu découvert le hip hop ?

Quand j’étais petite, j’ai pris beaucoup de cours de danse hip hop et c’est comme ça que j’ai commencé à m’intéresser au rap. J’ai découvert le rap à l’âge de 13 ans avec les Beastie Boys, les Fugees et avec des artistes argentins comme Attitude Maria Marta, un groupe très politique des années 1990.

Quand et comment as-tu commence à rapper et quels sont les artistes qui t’ont influencée ?

Les artistes que je viens de citer, mais aussi la rappeuse espagnole Mala Rodriguez. J’ai commencé à écrire en 2007, mais c’était du théâtre parce que j’étudiais la mise en scène et l’écriture théâtrale. Aussi grâce à la danse.

Comment décrirais-tu ta musique à des gens qui ne l’ont jamais entendue ?

Je fais de la musique en duo avec Ramiro Jota, mon producteur. On ne définit pas la musique que l’on fait. C’est une sorte de fusion unique. Ça va du punk au rap, en passant par la cumbia. On vient d’un pays de métissage et de colonialisme et tout ça se retrouve dans nos chansons. Il y a aussi des éléments de musiques latino-américaines d’autres pays. On aime tous les genres de musique, nous ne sommes pas des puristes.

Tu as récemment sorti le titre « La noche ». De quoi parles-tu dans ce morceau ?

« La noche » parle du fait de partir sans avoir peur, de laisser les choses se faire, de laisser aller son corps et son esprit et de faire de la danse une forme de résistance politique. C’est-à-dire de danser pour occuper la rue et l’espace, surtout pour les femmes. Nous avons une longue histoire d’oppression sexiste et aujourd’hui, grâce au combat de nombreuses femmes, je renforce et étends la lutte féministe.

Le morceau parle aussi de désir, du fait que j’aime bien quelqu’un et que j’ai envie de danser avec cette personne. Ça parle des femmes qui n’ont pas de préjugés mais aussi de plusieurs autres choses, parce que je n’aborde jamais qu’un seul sujet.

En quoi le hip hop est-il un outil politique ?

Le privé est politique. Si je décide de parler de certaines choses dans mes paroles et pas d’autres, c’est un choix politique. Je ne crois pas que tout le hip hop doit être politique. J’adore la trap et les textes qui n’ont pas forcément d’enjeux sociaux. Bien sûr que le hip hop peut être un outil politique, en fait ça a été une dimension très importante dans notre histoire à nous, quartiers marginalisés. Je crois aussi que la musique accompagne les mouvements sociaux, comme une bande-son…

Quelle place les femmes occupent-elles sur la scène rap en Argentine ?

Il y a beaucoup de rappeuses. Je vous recommande d’aller écouter Kriz Alanis, Sasha Sathya, Negrah Lyah, Dakalachina, Tnxx, et plein d’autres qui font des trucs super.

Dans quel féminisme te reconnais-tu le plus ?

Avec le féminisme populaire. Pas le féminisme marketing. Je crois aussi que nous avons beaucoup à apprendre de l’afro-féminisme et qu’il faut lire bell hooks.

Quelles sont les femmes qui t’inspirent ?

J’essaie d’être la meilleure version de moi-même. Mais de nombreuses femmes m’inspirent. Des journalistes, des chanteuses, des politiciennes… Des femmes qui ont fait de la musique avec passion, des femmes qui continuent à en faire avec passion.

Quels sont tes projets à venir ?  

Je sors mon quatrième album en février 2019. Avec des sons de plusieurs beatmakers et produit par Ramiro Jota. J’aimerais aussi aller aux États-Unis. Vous pouvez m’aider ?

Que penses-tu de Madame Rap ? Des choses à changer/améliorer ? 

C’est cool ! On se verra en 2019, on fait des concerts en France !

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Shani : « Être féministe, c’est comme ne pas être raciste, ça va de soi »

Madame Rap a rencontré la rappeuse Shani qui nous a parlé de son premier EP à paraître dans quelques semaines, de l’année sabbatique qu’elle s’est octroyée pour développer ses projets rap et de sa vision du féminisme !

Retrouvez Shani à l’open mic Artichaut Records mercredi 7 novembre aux Grands Voisins à Paris 14e et sur Facebook, YouTube et Instagram.

Fanny Polly : « Quand je suis sur scène avec 5 meufs devant mille gars, c’est une manif en soi »

Madame Rap a rencontré Fanny Polly, première rappeuse signée chez Scred Connexion, qui nous parlé de son premier album à venir « Tout une histoire », de son sud natal et du rôle-clé de la danse dans son appréhension du hip hop.  

Quand et comment as-tu découvert le hip hop ?

J’ai découvert le hip hop vers 13 ans. Je voulais faire de la danse, j’avais essayé le modern’ jazz, mais ce n’était pas pour moi. A 15 ans, j’ai essayé le break et ça a été une révélation. Je me suis mise à fond dedans.

Les cours m’ont appris les bases, mais après j’ai vite compris le délire du hip hop, de ne pas s’entraîner qu’une fois par semaine, dans une salle de danse, avec un prof. C’est une des rares danses où tu t’entraînes mieux dans la street que dans une salle. Après, j’ai monté une association, X-pression Art d’corps, pour que l’on puisse s’entraîner où on voulait et louer des salles.

Pourquoi as-tu eu envie de fonder une association de danse ?

Pour donner des cours, des stages, organiser des événements. J’ai commencé à donner des cours à 17 ans et j’ai fondé X-pression Art d’corps en 2006. Quand tu es dans le hip hop, tu ne te dis pas que tu vas en vivre, mais que ce sera un « hobby ». Aujourd’hui, on ne fait plus d’événements, mais on est un groupe. Je danse toujours, mais je pratique beaucoup moins qu’avant. J’ai beaucoup travaillé avec des enfants, dans l’animation, j’ai passé un diplôme de coach sportif/prof de fitness pour pouvoir donner des cours. Tous mes choix professionnels ont été guidés par le hip hop.

Et le rap, tu l’as découvert à quel âge ?

Vers 13 ans. Les premiers rappeurs que j’ai écoutés, c’était Psy 4 de la Rime, après Sniper, 113, Booba. Les rappeurs de l’époque. Et petit à petit, je me suis intéressée aux rappeurs d’avant, la Fonky Family, IAM, NTM. Je ne commence que maintenant à écouter les tous premiers rappeurs. J’ai fait le truc à l’envers !

J’écoutais aussi des meufs, comme Diam’s, Keny Arkana et Casey.

J’écoute du rap américain pour danser, mais à part les classiques, du style Dre, Eminem ou Busta Rhymes, je n’écoute que du rap français. J’aime trop la langue française, quand je ne comprends pas, ça me dérange.

J’ai toujours écrit mais j’ai commencé à essayer de rapper mes textes vers 16 ans.

Tu viens de Mouans-Sartoux (06) mais tu vis à Paris aujourd’hui. Pourquoi ce choix ?

Je suis née à Cannes et j’ai grandi à Mouans-Sartoux. J’en suis partie à 25 ans, il y a six ans. Parce que j’en avais un peu marre. J’avais envie de voir autre chose. Je venais d’avoir mon diplôme un an avant et je voulais acquérir de l’expérience rapidement.

Dirais-tu que la scène hip hop est importante dans les Alpes-Maritimes ?

Non pas du tout ! En danse, il y a Break The Floor, un gros événement break au Festival de Cannes. Mais c’est à peu près tout. En rap, il n’y a pas grand-chose. Le problème chez nous, j’en parle un peu dans le titre « Mon Sud », c’est qu’il y a beaucoup de racistes. Et qui dit racistes, dit ne pas aimer la culture hip hop. Les gens font tout pour la freiner et beaucoup de concerts sont annulés… C’est très compliqué. Si tu demandes à ceux qui font du hip hop, soit ils ont dû en partir pour en vivre, soit ils sont restés mais n’en vivent pas ou n’ont pas le succès qu’ils méritent. C’est un peu pour ça aussi que je suis partie.  En mode, quand je vais revenir, ça va vous faire mal !

Comment as-tu rencontré la Scred Connexion ? 

Arrivée à Paris, j’ai fait une formation professionnelle de danse à la « Juste Debout School » pendant deux ans. On a remonté le groupe X-pression Art d’corps avec les meufs de l’école. On en a fait un show qui s’appelait « Tout une histoire », comme mon album à venir, dans lequel on avait inclus du rap. Ça m’a réveillé l’envie de rapper. À Paname, par rapport à chez moi, j’ai l’impression que tout est possible. J’ai fait un open mic et j’ai rencontré la Scred Connexion. C’était vraiment eux que je voulais. Je m’étais dit, « si je fais un album, c’est avec eux ». J’avais contacté Haroun à la base, mais il était en Suisse et le hasard a fait que ce sont eux qui m’ont appelée.

Tu vas sortir ton premier album fin novembre. Avec qui as-tu travaillé en termes de prod ?

Je travaille beaucoup avec Marion Napoli, qui vient du Sud aussi. Elle est musicienne et fait de la prod. Un tiers des prods de l’album ont été faites par elle. Un autre tiers a été fait par El Gaouli, qui m’a été présenté par la Scred. Ça me parle ce qu’ils font. Après il y en a aussi des prods de Itam et Djam…

Que peux-tu nous dire sur ce projet ? 

Il sortira fin novembre. Il y aura 16 titres et il ne manque plus que la pochette ! On va essayer de clipper un maximum de titres.

Comment s’est passée ta collaboration avec Demi Portion ? 

On s’est rencontré au Demi Festival, on a tourné le clip le lendemain à Sète. Ça s’est fait un peu à l’arrache, mais c’est les meilleurs plans !

Si tu devais définir ton son, tu dirais que c’est quoi ? 

Je ne dis même pas aux gens que je fais du rap ! Je dis que je fais de la musique. Je trouve que les gens ont encore beaucoup d’à priori à ce niveau-là. Dès que je dis à des gens hors milieu hip hop que je fais du rap, je sens un changement chez eux et ils me renvoient de vieux clichés, font des amalgames. C’est aussi un peu de la discrétion. Dans mon travail, je n’ai pas envie de tout mélanger.

Mais si on me demande quel style de rap je fais, je vais avoir tendance à dire que je fais plutôt du « rap conscient ». Mais je ne mets pas trop dans une case. Si tu écoutes mon album, tu vas trouver du boom bap, de la trap, de l’afro, des délires rock n’ roll ou même hard rock…

En tant que rappeuse, te retrouves-tu souvent confrontée au sexisme ?

Oui. Les clichés les plus fréquents quand tu dis que tu fais du rap, c’est de penser que tu es une caillera ou un garçon manqué. Les gens qui ne sont pas là-dedans vont commencer à te parler en « wesh-wesh ». Même si le break a un peu une image de bonhomme, c’est différent avec la danse. Les gens hors milieu hip hop sont plus admiratifs d’une meuf qui tourne sur la tête que d’une meuf qui rappe. Ou alors il y en a qui se disent que c’est nul sans avoir écouté. Sans me le dire directement, mais je sens bien qu’ils ne me prennent pas au sérieux.

Est-ce que tu te définis-comme féministe ? 

Non. Pour moi, par définition, une femme est féministe. À partir du moment où tu es une femme, tu dois te défendre tous les jours. Pour moi, ce terme devrait être réservé aux hommes. Je trouve qu’on est toutes militantes au quotidien. Je ne fais pas de manif, ce genre de choses, mais ce que je fais, quand je suis sur scène avec 5 meufs devant mille gars, c’est une manif en soi. Donc dans ce sens-là, je suis féministe, mais je ne me reconnais pas dans ce terme. Être une femme, c’est un combat en soi.

Que penses-tu de Madame Rap ? Des choses à changer/améliorer ? 

Ce que je kiffe, c’est que c’est international, donc ça m’a fait découvrir plein de meufs partout dans le monde. Je pense que ce serait bien qu’il y ait plus d’interviews vidéo. Parce qu’en tant que rappeuse, je préfère répondre aux questions à l’écrit mais en tant que lectrice, je préfère voir les gens !

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VIDÉO – 30 chansons de rappeurs qui rendent hommage aux femmes

« Le rap est la musique la plus sexiste qui existe », nous répètent sans cesse les médias grand public et le discours dominant.

Ce qu’ils oublient de dire, c’est qu’il existe aussi des rappeurs qui parlent des femmes sans les dénigrer, comme des égales, voire produisent des textes carrément pro-féministes, loin des clichés de gros machos versus femmes-objets.

Pour rappeler que le rap est pluriel et parfois beaucoup moins sexiste que la variété, le rock ou la pop, voici 30 chansons de rappeurs français et américains qui rendent hommage aux femmes.

 

• A Tribe Called Quest – Bonita Applebum
• The Beastie Boys – Sure Shot
• Black Star – Brown Skin Lady
• Boogiemonsters – Honeydips in Gotham
• Common – The Light
• Drake – Fancy
• Ghostface Killah – Camay
• J.Cole – Crooked Smile
• Jay-Z – Smile
• KRS-One – Womenology
• Lil Wayne – Something You Forgot
• Mase – What You Want
• Method Man – I’ll Be There for You/You’re All I Need to Get By
• Outkast – Jazzy Belle
• Remy Banks – Feast
• Shad – Keep Shining
• T.I. – Got Your Back
• The Roots – You Got Me
• Webbie – Independent
• Akhenaton – Nid de guêpes
• D’ de Kabal – #JeSuisFemme
• Georgio – Svetlana et Maïakovski
• IAM – Une femme seule
• Ismaël Métis – Permis de déconstruire
• Médine – Combat de femme
• Nekfeu – Mauvaise graine
• Oxmo Puccino – Mama Lova
• S-pri noir – Baby Gyal
• Vin’S – #MeToo

Danitsa : « Je ne connais pas une femme qui ne négocie pas chaque jour sa place »

A l’occasion de son concert le 6 octobre au Nouveau Casino à Paris, Danitsa, rappeuse/chanteuse française basée à Genève, nous a parlé de son chemin dans le hip hop, de son album Ego et de ses rôles modèles. Rendez-vous à la fin de l’interview pour bénéficier de places à tarif réduit !

Quand as-tu découvert le hip hop et comment as-tu commencé à rapper ?

J’ai découvert le hip hop avec ma mère et ses frères et je m’y suis un peu plus intéressée en écoutant Radio Ado. Je pense que j’ai appris à chanter/rapper en essayant d’imiter les différents artistes que j’écoutais. Le morceau passait et je posais ma voix dessus en même temps que l’artiste.

Tu es souvent présentée comme la Lauryn Hill suisse. Que penses-tu de cette comparaison ?

Cette comparaison me flatte énormément car elle fait partie des artistes que j’admire mais  je pense que je ne mérite pas cette comparaison. Lauryn Hill est une icône. Cette femme a tant d’expériences et de talents. Moi, à côté je suis une artiste en plein développement et j’ai du chemin à parcourir.

En quoi tes origines influencent-elles ta musique ?

Je suis française et de par mes origines : congolaise, espagnole, tchadienne et Serbe. Je ne pense pas que ce sont forcément mes origines qui influencent ma musique mais plutôt la transmission qui s’est faite à la maison. Enfant, j’ai baigné dans différents univers musicaux. Mon père est féru de musique jamaïcaine et ma mère écoutait de la soul et du hip hop. Et puis, les rencontres aidant j’ai exploré d’autres choses. Je me produis avec un DJ mais aussi avec des musiciens. La même chanson prend une autre dimension quand elle est jouée par des musiciens et me pousse à explorer d’autres façons de chanter.

Comment travailles-tu tes morceaux ? As-tu des rituels ou des techniques d’écriture particulières ?

J’écoute des prods en studio de préférence car la qualité du son ressort mieux. Commence alors un long travail de sélection. Une prod doit me donner envie de raconter quelque chose car chacune de mes chansons raconte une histoire. Une histoire dont je cherche aussi la mélodie. La mélodie c’est primordial, c’est ma manière « d’habiter » le son avec le texte c’est ainsi que naissent mes morceaux. J’échange beaucoup avec le producteur Vie d’Ange et c’est ainsi que le morceau naît.

Tu as sorti l’année dernière l’album Ego dont le titre « Remember Me », qui sonne comme un hymne féministe. Es-tu d’accord avec cette appellation ? Te définis-tu comme féministe ? 

Oui je le suis, et fière de l’être. Chaque personne est libre d’interpréter ce morceau comme elle le souhaite.

Pour « Remember Me », j’ai écrit des petits moments que j’avais vécus et qui me faisaient marrer ou grogner.

Mes morceaux féministes dans mon album sont plus : « Bachata » où je parle d’un mec qui ne pense qu’à son plaisir sexuel personnel sans penser à l’autre et « Bad Luck » qui raconte une histoire d’amour avec un homme violent et possessif.

Qui sont tes rôles modèles féminins et pour quelles raisons ?

Je dirais que ce sont les femmes de ma famille qui m’ont inculqué des valeurs que je trouve justes. Ma mère m’a appris à me battre pour réaliser mes rêves, à ne pas renoncer, à tirer des leçons de mes échecs et les transformer en victoires. J’aime les femmes qui ont confiance en elles, qui s’estiment, qui n’ont pas peur de se fier à leur instinct.

J’ai envie de dire que j’admire toutes les femmes depuis qu’Eve a croqué la pomme, elles sont des modèles, des modèles de connaissance. Je ne connais pas une femme qui ne négocie pas chaque jour sa place, qui n’est pas une Captain à son échelle. Il y a évidemment les plus célèbres, des écrivaines, des cinéastes, des chanteuses, des politiques, je pourrais dire Angela Davis mais je pense à toutes les femmes ordinaires qui chaque jour réalise des choses qui ne sont peut-être pas de l’ordre de l’exceptionnel mais qui sont puissantes, courageuses qui avancent et qui sont solidaires et croient à tous les possibles! Il y a celles qui bougent et font craquer le plafond de verre, celles dont la parole est enfin libérée avec #MeToo et #BalanceTonPorc pour dire « plus jamais ça » !

Tu seras en concert le 6 octobre à Paris au Nouveau Casino. A quoi devons-nous nous attendre ?

Attendez-vous à un concert de folie. Un moment magique que l’on partagera avec vous. Un gros turn up. Beaucoup de chaleur et d’émotions !

Quels sont tes autres projets à venir ?

Je suis actuellement en train de travailler sur mon deuxième album. Un single sera disponible prochainement et j’ai plein de surprises que je vous ferai partager, mais pour l’instant chut !

Madame Rap vous propose des places à 19 euros au lieu de 22 euros pour le concert de Danitsa le 6 octobre au Nouveau Casino à Paris ! Pour bénéficier de l’offre rendez-vous ici avec le code promo « madamerap » !

VIDÉO – 65 rappeuses françaises actives aujourd’hui

Parce qu’en 2018, il n’est plus possible de dire « il n’y a aucune femme dans le rap » ou « il n’y a pas eu de rappeuse depuis Diam’s », voici une sélection de 65 rappeuses françaises actives aujourd’hui.

Avec :

A2N – Paris (75)
AK47Meow – Saint-Ouen (93)
Amy – Choisy-le-Roi (94)
Bau Bô – Paris (75)
Billie Brelok – Nanterre (92)
Bounty – Montreuil (93)
Brö – Paris (75)
Bumble Bzz – Saint-Ouen (93)
Casey – Le Blanc-Mesnil (93)
Cayene – Millau (12)
Chilla – Paris (75)
Dieselle – Pontoise (95)
EMMA – Lille (59)
Fanny Polly – Paris (75)
FLO – Guadeloupe
Grâce et Volupté Van Van – Toulouse (31)
Illustre – Clermont-Ferrand (63)
K’s Khaldi – Saint-Etienne (42)
Kayanna Isis – Guyane
Kayline – Aubervilliers (93)
Keny Arkana – Marseille (13)
Kwezi Kimosi – Paris (75)
L’Originale K – Nantes (44)
La Go 2 Feu – Paris (75)
Ladéa – Aix-en-Provence (13)
Lala &ce – Paris (75)
Larose – Guadeloupe
Lasista – Montélimar (26)
Lean Chihiro – Paris (75)
Le Juiice – Boissy-Saint-Léger (94)
Lexie T – Lille (59)
Leys – Reims (51)
Liza Monet – Paris (75)
Lor’A Yéniche – Metz (57)
Lylice – Paris (75)
Mac Manu – Paris (75)
Maëv – Béziers (34)
Méryl – Martinique
Milky M – Colombes (92)
Moon’A – Athis-Mons (91)
Nayra – Saint-Denis (93)
Orel Sowha – La Rochelle (17)
Original Laéti – Paris (75)
Paloma – Paris (75)
Pumpkin – Nantes (44)
Punchlyn – Roubaix (59)
Radikale Junkypop – Saint-Etienne (42)
Renä – Nîmes (30)
Ryaam MC – Paris (75)
Safyr Sfer – Lyon (69)
Sarazz – Avignon (84)
Shani – Wissous (91)
Sianna – Beauvais (60)
Siren – Brest (29)
Skyna Justecause – Cannes (06)
Stélyna – Paris (75)
Sweet Chili – Aix-en-Provence (13)
Syn Cha – Marseille (13)
Tipimente – La Réunion
Tracy De Sá – Lyon (69)
Tracy K – Marseille (13) / Paris (75)
Veuve Noire – Marseille (13)
Vicky R – Lille (59)
Waka – Marseille (13)
Yésima – Granville (50)

 

Asha Griffith : « Sans les luttes des Noir.e.s, il n’y aurait ni de hip hop ni de jazz »

Madame Rap a demandé à la rappeuse et chanteuse américaine Asha Griffith de nous parler de son parcours dans le hip hop et le jazz et de sa collaboration avec The Wolphonics, projet mené par le saxophoniste français Fabrice Theuillon, dont l’album « The Bridge » sort le 14 septembre. 

Quand et comment as-tu découvert le hip hop et le jazz ?

Mon grand-père était musicien de jazz, il jouait du Bob Marley du doo wop et d’autres vieux succès quand j’étais jeune. C’est la première fois que je me souviens avoir entendu du jazz. J’aimais sa sélection (probablement parce que j’ai entendu les chansons tellement de fois), mais je n’écoutais pas de jazz par moi-même à ce moment-là, seulement avec lui. En ce qui concerne le hip hop, je ne me souviens pas. Je pense que j’ai dû en entendre à la radio. Je suis née dans les années 1990 et le hip hop était plutôt populaire à l’époque où j’ai commencé à écouter de la musique par moi-même. 

Quand et comment as-tu commencé à rapper ?

Mon père m’a encouragé à rapper quand j’avais 10 ans. Il voulait qu’on fasse un EP avec mon jeune frère, qui avait 5 ans à l’époque. Il a produit la musique et j’ai co-écrit les paroles des morceaux. Nous sommes allés en studio et tout. Nous avons même joué lors d’événements locaux et vendu nos CDs et nos affiches. Le EP s’appelait « Me and My Little Brother ». Mais e n’étais pas prête pour l’aspect management d’artiste… Parfois, je voulais regarder des dessins animés au lieu de répéter donc cette histoire de rap n’a pas durer longtemps. Je voulais arrêter, donc à 11 ans, je n’étais déjà plus rappeuse lol. 

Et à faire des claquettes ?

J’ai commencé à prendre des cours dans une école dans le New Jersey. J’ai fait tous styles de danses de 5 à 17 ans, mais les claquettes étaient ma préférée. J’ai réalisé que j’aimais vraiment ça vers 11 ans.

Comment as-tu rencontré Fabrice Theuillon et rejoint le projet The Wolphonics ?

Fab a découvert ma musique sur Soundcloud. Je venais de mettre en ligne ma première mixtape « Masterbait ». Si vous ne l’avez pas encore écoutée, accordez-moi vos oreilles pour quelques minutes. Donc il m’a envoyé un mail pour me dire qu’il était originaire de Paris et voulait me rencontrer pour parler d’un featuring sur un album sur lequel il travaillait. J’avais quelques appréhensions au début, mais nous nous sommes rencontrés quelques jours plus tard à Brooklyn et l’année suivante nous avons collaboré sur plusieurs titres. Il m’a ensuite fait venir à Paris pour le premier concert des Wolphonics. On continue de construire ensemble depuis.

Selon toi, quels sont les points communs entre le hip hop et le jazz ?

La culture et l’expression. Le jazz et le hip hop sont des musiques noires américaines et une extension de la musique africaine. Sans les luttes et l’oppression des Noir.e.s aux États-Unis, il n’y aurait ni de hip hop ni de jazz. Ce que les gens aiment dans ces deux musiques est l’authenticité. C’est transparent. C’est vrai. C’est brut. C’est ce qui les rend si incroyables.

Tu viens du New Jersey. Quelle place occupent les femmes sur la scène hip hop là-bas ?

Il n’y a pas de scène « féminine » ou « masculine ». Il y a des femmes très talentueuses qui se démarquent dans le New Jersey. Felisha George est l’une de mes préférées dans la communauté hip hop. Beaucoup de chanteuses s’essayent au rap, mais là encore, ce n’est pas le propre des femmes. 

Te définis-tu comme féministe ? Si oui, de quelle forme de féminisme te sens-tu la plus proche ?  

Je crois en l’égalité politique, économique et sociale. Je ne connais pas les différentes formes de féminisme. Donne-moi deux secondes pour regarder sur Google et je reviens … Hum, je ne me reconnais pas vraiment dans les dénominations que j’ai trouvées. Je peux juste dire que je ne suis pas radicale ou anti-hommes.

Qui sont tes rôles modèles féminins et pour quelles raisons ?

Ma mère. Je la connais personnellement et je sais à quel point elle a travaillé dur pour ce qu’elle a.

Quels sont tes projets à venir ?

Je travaille sur un album intitulé « Moodswings! » et un EP qui s’appelle « Songs That Smell Good ».

Que penses-tu de Madame Rap ?  Des choses à changer/améliorer ?

Vu que je ne parle pas français, mon expérience sur le site est limitée, mais j’ai l’impression que la mise en page a changé depuis la dernière fois que j’y suis allée. C’est bien le cas ? Quoiqu’il en soit, je kiffe et j’aime le fait que Madame Rap soutiennent les femmes du monde entier, et pas seulement en France.

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Photo © Stanislas Augris