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Justina : « En Iran, les gens pensent que les femmes ne devraient pas chanter »

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Figure phare du rap en Iran, Justina  est active dans le hip hop depuis l’âge de 16 ans. La rappeuse nous raconte son parcours et ses combats dans un pays où les femmes qui chantent seules en public risquent la prison.

Quand et comment as-tu découvert le hip hop ?  

Je suis passionnée de musique depuis que je suis enfant et j’ai toujours chanté, mais je n’aurais jamais pensé que je deviendrais chanteuse un jour. Je connaissais le rap américain mais j’ai découvert le rap perse quand j’avais 16 ans avec le groupe de hip hop underground iranien Zedbazi. J’étais adolescente à l’époque, j’avais beaucoup d’énergie et de rêves et je me sentais forte. J’ai réalisé que le hip hop et le rap pouvaient être mes meilleurs amis, m’aider à comprendre mes émotions et me rendre plus forte. J‘écoutais des rappeurs iraniens et américains.

Tu écris, tu chantes et tu rappes. As-tu commencé les trois en même temps ?

J’ai commencé à écrire des poèmes classiques quand j’avais 10 ans et je n’avais aucune expérience dans l’écriture de textes de rap avant l’âge de 16 ans.

En Iran, être une chanteuse ou rappeuse politique est passible de prison. C’est pour cette raison que tu as enregistré de nombreux titres en cachette. Comment vis-tu toute ça ?

Ca signifie que je prends de nombreux risques, tout comme toutes les chanteuses underground, mais on veut faire ce qu’on veut ! Et on ne peut pas tirer un trait sur nos rêves.

A quoi ressemble la scène hip hop féminine en Iran ? Existe-il d’autres rappeuses qui défient le pouvoir comme toi ?

Je vis à Téhéran, en Iran et la scène hip hop « féminine » ne se porte pas bien là-bas. Les gens pensent que les filles ne devraient pas chanter, encore plus rapper, parce que dans notre culture, quand une femme chante ou fait de la musique, cela signifie qu’elle rencontre d’autres artistes masculins qui peuvent abuser d’elle. De nombreuses filles ont peur de s’exprimer et de réaliser leurs rêves à cause de notre gouvernement. Mais il y a d’autres femmes comme moi qui ne peuvent pas se cacher.

Selon toi, qu’est ce qui devrait être changé dans la société iranienne pour améliorer la vie des femmes ?

Tout d’abord, les gens doivent changer leur manière de penser et comprendre que les femmes sont des êtres humains. S’ils comprennent ça, tout sera plus facile pour nous.

Te définis-tu comme féministe ? Pourquoi ?

Non. Parce que je revendique mes droits, mes droits humains, des droits que les hommes ont, mais que je n’ai pas.

Qu’écoutes-tu en ce moment ?

De la bonne musique de tous genres avec des bons textes.

Quels sont tes projets à venir ? Aura-t-on la chance de te (re)voir bientôt en France ?  

J’ai quelques projets qui vont sortit bientôt et mon nouveau clip « Mesle Ham » est sorti il y a quelques jours. J’espère revenir à Paris et y faire un gros concert.

Que penses-tu de Madame Rap ? Des choses à changer/améliorer ?

C’est une bonne idée et je pense que ça peut devenir une émission de télé, comme une sorte d’introduction aux rappeuses.

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