Elles s’appellent Bittah, Sombra Alor et Masiva Lulla. Avec le DJ Big Mark, elles forment le groupe de rap barcelonais Tribade, qui a vu le jour en 2017. Les trois rappeuses féministes queer nous ont parlé de la naissance du trio, de leur album Las Desheredadas sorti en février dernier et de féminisme autonome.
Quand et comment avez-vous découvert le hip hop ?
Nous avons découvert le hip hop à l’adolescence, un âge particulier où on absorbe profondément les choses et où on ressent le besoin de s’exprimer d’une manière ou d’une autre. Le rap a quelque chose dans ses codes qui peut toucher très profondément, pas seulement par sa capacité discursive, mais aussi par sa force et son énergie.
Quand et comment est né Tribade ?
Tribade est né il y a deux ans, en 2017, à Barcelone, d’abord avec la rencontre des rappeuses Masiva Lulla et Bittah, puis avec l’arrivée de Sombra Alor et DJ Big Mark. À l’époque, les mouvements féminismes et hip hop commençaient à se retrouver dans certains squats.
Comment décririez-vous votre musique à des gens qui ne l’ont jamais entendue ?
C’est un mélange de discours, de messages et d’esthétique. De la culture, de la résistance et de la musique urbaine.
Vous êtes des artistes indépendantes. Est-ce un choix ?
Nous travaillons avec Propaganda pel Fet!, un label et une boîte de management indépendants, mais aussi une coopérative catalane qui soutient depuis toujours les artistes engagé·e·s et alternatif·ve·s. Cette collaboration ne présente aucune contradiction pour nous, car nous partageons la même vision de la musique et de l’industrie musicale.
Vous avez sorti l’album Las Desheredadas en février dernier. Qui sont ces “desheredadas”?
Ces « défavorisées » sont toutes les femmes qui se battent contre le système et contre sa simple existence. Toutes celles qui sont en dehors de la norme et de la loi, à qui on dicte ce qu’elles sont censées être socialement parlant.
Le titre La Purga est un hymne queer et féministe très fort. Comment a-t‘il été accueilli en Espagne ?
Initialement, nous pensions que La Purga recevrait beaucoup de critiques négatives… Non pas hors du mouvement féministe mais en son sein ; et en fait, la chanson a permis de développer une sororité plus importante. Après sa sortie, nous avons reçu énormément de retours positifs qui ont permis d’ouvrir un débat nécessaire sur le sujet.
Le clip a-t’il été tourné dans une véritable église ?
Oui, le clip a été tourné dans une véritable église, qui est aujourd’hui désacralisée et qui appartient à l’Institut du Cinéma Catalan.
Vous identifiez-vous comme des rappeuses queer ?
Nous nous identifions comme des rappeuses queer, si on entend par « queer » le fait de parler d’un féminisme autonome qui inclut toutes les identités trans, gay et dissidentes et les notions d’antiracisme et d’anticapitalisme.
De quel courant féministe vous sentez-vous les plus proches ?
On soutient et se reconnaît dans le féminisme autonome, qui prend en compte les différentes formes d’oppressions, et donc, dans le féminisme intersectionnel. Et aussi dans un féminisme qui voit le patriarcat et le racisme comme des aspects centraux du capitalisme et des oppressions qu’il perpétue.
Quels sont vos projets à venir ?
Nous cherchons constamment à améliorer notre live show et travaillons sur de nouveaux featurings et collaborations avec des groupes que nous apprécions. Nous cherchons aussi toujours à explorer de nouvelles sonorités, approfondir nos discours, nos concepts ainsi que les débats et les identités visuelles.
Que pensez-vous de Madame Rap ? Des choses à changer ou améliorer ?
C’est une très bonne idée et un projet intéressant. Il existe peu de médias exclusivement consacrés au rap fait par des femmes. De ce que nous avons vu, en France, la visibilité des femmes sur la scène rap est bien meilleure qu’en Espagne : par exemple, il y a quelques années, avant de lancer Tribade, certaines d’entre nous ont joué au Femcees Fest à Saint-Étienne, un événement international dédié aux rappeuses. Donc, plein d’amour et de soutien à Madame Rap et merci pour votre intérêt !!!!
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