La rappeuse niçoise désormais basée à Montreuil (93) nous parle de son parcours dans le hip hop, notamment de sa rencontre avec DJ Idem, de son nouvel EP Limerence et de son féminisme.
Quand as-tu découvert la culture hip hop ?
Avec les B-boys, street artistes et graffeurs de la ville de Nice. Je devais avoir 12 ans. J’étais de base imprégnée de funk, de soul et de R’n’B par le biais de ma mère depuis que je suis née.
Quand et dans quel cadre as-tu commencé à rapper ?
J’ai commencé à gratter mes premières lyrics vers l’âge de 14 ans, au moment où mes parents se sont séparés et où je venais de perdre ma grand-mère, qui était comme une deuxième mère pour moi. On était une équipe qui venait de différents quartiers de Nice. On traînait en ville, comme on dit là-bas, sur la place Masséna, le premier terter que j’ai connu où on mélangeait rap, danse et business …
Tu viens de sortir le EP Limerence. Peux-tu nous présenter ce projet ?
Dans mon EP, j’ai eu le grand plaisir de laisser s’exprimer ma base rap et trap sur des beats imprégnés de rythmiques afro-caribéennes et même latinos qui m’inspirent et me tiennent à cœur depuis mon enfance. Il a été réalisé en co-production avec Big Factory Records, et en particulier avec DJ Idem.
Dans l’équipe, nous sommes tous perfectionnistes au sujet de notre musique, et la sortie a été décalée plusieurs fois pour différents détails jusqu’à ce qu’on se retrouve à sortir le projet en plein coronavirus… Est-ce que c’est mon karma ? Je ne sais pas !
Tu collabores régulièrement avec DJ Idem. Comment vous êtes-vous rencontrés et comment avez-vous commencé à travailler ensemble ?
C’est mon ami WIra Black Viking qui me l’a présenté. À l’époque, je cherchais de nouveaux beatmakers avec qui bosser sans avoir à me prendre la tête avec des dalleux qui voulaient mélanger sexe et taf. Il a pensé direct à DJ Idem !! Du coup, je l’ai check et il m’a filé 3 beats. L’aventure a commencé à ce moment-là. Depuis, on bosse en co-prod et j’adore l’énergie, l’univers et l’ambiance dans laquelle on travaille, en s’écoutant mutuellement pour avancer.
Si quelqu’un veut découvrir ta musique, quel morceau lui conseillerais-tu d’écouter en premier ?
Je lui conseillerais d’aller jeter un œil sur mon EP et je lui demanderais de me donner son avis, quel titre il a préféré, si il y en a un. Je ne peux pas choisir à la place du public.
Comment écris-tu tes morceaux ? As-tu des thèmes de prédilection ou des rituels particuliers ?
J’écris en mode tout terrain. Parfois, c’est le beat qui m’inspire un thème, d’autres fois, j’ai un sujet sur lequel je veux m’exprimer et je cherche le son qui collerait bien dessus. Ça m’arrive aussi d’être en studio et d’écrire en live, selon l’inspiration du moment.
Mes thèmes de prédilection, c’est de m’exprimer sur tous les sujets qui me révoltent ainsi que sur ceux qui me rendent heureuse. Ça tourne autour de la violence du système, des vieux réacs qui peuvent être très jeunes parfois, du délit de faciès sous toutes ses formes et de la liberté de ma vie de bohème.
On peut également t’entendre sur Fréquence Paris Plurielle 106.3 FM. Comment t’es-tu retrouvée à animer une émission de radio ?
Le kiff a commencé il y a 6 ans quand j’ai rencontré Johanne Jean-Charles lors du tournage du documentaire Hip Hop Around The World pour Kurtis Blow, le premier rappeur américain à avoir signé en major. La sista gérait la régie et on s’est bien entendu. Du coup, elle m’a proposé de co-animer avec elle « Terremoto » une émission spéciale « musica latina ». Grâce à elle, j’ai pu apprendre à animer une émission, faire des interviews et aussi à gérer la régie avec Ness Pounta qui avait deux émissions hip hop dans la même radio.
Quelles sont les femmes qui t’inspirent ?
Marilyn Monroe, qui est restée mythique malgré toutes les attaques sexistes qu’elle a subies, sans oublier son style et son attitude pin-up. Madonna, pour sa carrière, elle a même réussi à se faire excommunier par le Vatican ! Aretha Franklin, pour son charisme et ses paroles. Rihanna, pour son coté belle et rebelle. Plus récemment, Stefflon Don et Megan Thee Stallion pour leurs explicit lyrics, leur flow et leur swag.
Te définis-tu comme féministe ? Si oui, comment définirais-tu ton propre féminisme ?
Oui je le suis, parce qu’il faut encore se battre pour l’égalité des droits entre hommes et femmes de nos jours en France et dans le monde entier.
Personnellement, j’adore être féminine et c’est malheureusement dangereux à notre époque d’assumer ses formes et son style. C’est pire si on ne rentre pas dans la case passe-partout. Beaucoup d’hommes prennent cela pour une invitation au sexe et peuvent être agressifs, insultants ou dangereux en passant à l’acte. Sans oublier nos salaires qui ne sont pas égaux, le droit à l’avortement, au mariage et à l’adoption pour la communautés LGBT.
Quels sont tes projets à venir ?
Je vais sortir Limerence Part 2. On a coupé le projet en deux parties, accompagnées de quelques morceaux bonus. Je vous en dirais plus d’ici peu.
Que penses-tu de Madame Rap des choses à changer à améliorer ?
Je pense que c’est un média important dans le monde du hip hop, qui met en avant les femmes du rap français et international qui ne sont pas suffisamment visibles sur les sites hip hop en général, alors qu’il y en a beaucoup qui n’ont rien à envier aux hommes niveau lyrics et flow !
Une chose à améliorer, arriver à donner encore plus envie aux hommes de venir sur le site et de partager leurs homologues féminins. Le combat continue.
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