Madame Rap a rencontré la rappeuse lyonnaise KLM, membre du groupe « Les Artisans des Bonnes Ondes » (LABO). L’artiste, qui se définit comme « kickeuse et amoureuse des mots et des lettres », nous a parlé de son parcours dans le rap !
Quand et comment as-tu commencé à rapper ?
J’ai commencé à rapper vers 16 ans. J’avais des potes autour de moi qui rappaient, et j’étais surtout fan de rap. A cette époque-là, c’était le début du téléchargement, il n’y avait pas encore YouTube. J’étais une grosse collectionneuse. Je téléchargeais tout. Les grands classiques comme les nouveautés du moment. Je les connaissais tous par cœur. J’ai toujours eu des facilités en termes d’écriture. En fait, je kiffais ça, donc je me suis dit « pourquoi pas moi », et j’ai commencé à écrire mes premiers textes.
Et est arrivé le jour où j’ai sorti mon rap de ma chambre. Un soir, en me promenant avec une pote sur les quais à Lyon, j’aperçois une bande qui rappent en cercle autour d’une grosse enceinte. Un micro passe de main en main. Ma pote me pousse à y aller, donc je m’approche, hyper timide. Il n’y avait que des pélos. Et ça c’est trop bien passé ! C’était trop un bon moment parce que j’ai rencontré plein de gens, j’ai eu plein de critiques constructives.
Comment as-tu intégré le groupe LABO ?
En 2015, je me suis inscrite à un atelier qui s’appelle LABO RAP à Bizarre (Vénissieux, 69). C’était un atelier sur un trimestre. J’y allais pour prendre de la technique et progresser. Là-bas, j’ai rencontré sept gars. On s’est donné comme objectif de créer des morceaux pour faire une scène ensemble, et donc faire ma première scène. Sur ces trois mois de travail, il y a eu un vrai coup de foudre musical. De cet atelier-là, on est devenu un groupe.
Le groupe m’a vraiment apporté un truc de ouf. C’est avec eux que j’ai progressé. C’est avec eux que j’ai appris à compter des mesures, que j’ai compris que le rap ce n’était pas que des lettres, c’était aussi des maths…
Les Artisans des Bonnes Ondes, c’est toujours d’actualité, et c’est vraiment une force pour moi. Après, la petite différence aujourd’hui, c’est que comme je cherche à me professionnaliser, je ne peux plus m’investir autant, mais le groupe continue de tourner.
Tu as fait tes premières scènes en tant que rappeuse avec le LABO, mais quelle a été ta première expérience de scène en solo ?
À peu près vers 2016. C’est Bizarre qui m’a proposé ma première scène. La scène, j’aime trop ça : le contact avec le public, l’adrénaline, c’est un kif de ouf !! Mais la scène, ça se travaille ! Bizarre m’a grave aidée là-dedans. J’ai tourné dans pas mal de salles à Lyon, grâce au réseau notamment (Bamboox, Amalaita…) et en moins d’un an, je trouve que j’ai quand même un beau CV.
Que signifie être rappeuse pour toi ?
Avant tout, le rap c’est une musique qui m’a bercée depuis toute petite. La musique est un vrai exutoire pour moi. Cela me permet de poser mes mots sur mes sentiments, mes détresses, sur ce qui se passe dans le monde. Le rap est un moyen d’expression mais aussi un moyen de faire passer des messages plus engagés, voire militants.
Comment vis-tu le fait d’être une femme dans le rap aujourd’hui ?
Pour l’instant, pour moi, c’est un avantage, parce que justement on est peu, donc je peux avoir une visibilité hyper rapide, hyper facilement. Il y a des places à prendre. J’ai la chance d’être bien entourée, et même si c’est un « milieu d’hommes », je ne suis tombée que sur des gens bienveillants.
Quels sont les thèmes récurrents dans tes textes ou les thèmes que tu aimes bien aborder ?
La plupart des trucs que je vais aborder sont en lien avec des injustices. Peu importe le type d’injustices. Et sinon, je suis surtout sur une écriture un peu introspective.
En parlant d’injustices, il y a quelques mois tu as sorti le clip Exil qui a l’air d’avoir été un gros projet. Tu peux m’en parler ?
Exil, de par le message, je voulais que ce soit un assez gros truc. Comme le propos était dur, je l’ai mis en scène par la danse. Au final, on était plus de trente autour de ce clip ! Cette collab-là, pour le coup, n’avait rien de marketing. C’était vraiment beaucoup beaucoup d’amour, beaucoup de talent, beaucoup de bienveillance. Tous les gens qui y ont participé l’on fait pour le propos, et ça a été trop fort !
Quels sont tes projets en ce moment ? Qu’est-ce que tu as envie de faire de ta pratique du rap et de ta pratique musicale ?
Je vais faire un petit flash-back. En 2016-2017, mes potes m’ont offert comme cadeau d’anniversaire de pouvoir enregistrer en studio. De là, j’ai produit mon premier EP, Ici-Bas, qui est sorti en février 2018. J’ai commencé à sortir, présenter, défendre mon projet en faisant des concerts, en sortant des clips. Donc j’ai mis les pieds dans la professionnalisation, qui est un gros chantier où en fait, j’ai toutes les casquettes (création audio, visuelle, com, etc…). Du coup, pendant un an, je me suis mise à plein temps dans la musique, ça m’a permis d’avancer assez vite dans la projection de ma carrière.
Là, je suis en train de créer un premier album. J’arrête les concerts pendant une petite période, en tout cas, en tant que KLM. Je me focalise sur la créa, sur cet album, sur sa sortie, la stratégie et tout ce qu’il faut pour pouvoir le mettre en œuvre.
Que penses-tu de Madame Rap ? Des choses à changer/améliorer ?
Quand j’ai découvert Madame Rap, j’ai trouvé ça hyper cool ! Moi-même, plein de fois quand je cherchais des sons de meufs, je galérais. Pour trouver de nouvelles artistes, c’est compliqué. Avec Madame Rap, je trouve qu’on découvre plein de trucs, surtout au niveau de la scène internationale et ça, c’est trop riche. Je trouve surtout que Madame Rap fait parler du rap indé, du rap qui ne sort pas, du rap qui n’est pas sur les radios et ça, c’est trop bien. Au-delà de défendre les femmes dans le rap, je trouve que c’est aussi défendre le rap indé et sortir de cette industrie capitaliste.
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Propos recueillis par Maëlis Delorme.
Photo : ©Benjamin Vallet