Née en Guyane française de parents haïtiens, Turtle White grandit à Deuil-La-Barre (95) avant de s’installer à Montreuil (93). Révélée par le tremplin Rappeuz en 2019, la rappeuse de 24 ans nous raconte son parcours dans le rap, son univers musical (qu’elle nomme « deep trap song ») et son rapport à l’écriture.
D’où vient le nom Turtle White ?
Ce nom est plus qu’un blaze et représente beaucoup de choses pour moi. C’est vraiment une façon d’être. « Turtle » veut dire tortue en anglais et dans certaines cultures, la tortue représente la longévité et la sagesse, ce qui me correspond bien. Je suis quelqu’un de très peace et patient, ça peut se ressentir dans mon flow nonchalant et ma façon de poser. Dans ma vie, je suis pareil, on peut dire que je suis quelqu’un d’assez lent !
« White », vient d’une rencontre avec une personne qui est aujourd’hui devenue mon amie. C’est une personne assez spirituelle, qui croit beaucoup aux énergies, et quand on s’est rencontré, elle m’a appelée « cœur blanc » parce qu’elle a senti qu’il y avait quelque chose de pur en moi. J’ai gardé cette idée et créé le blaze Turtle White.
Depuis quand rappes-tu et quel·le·s sont les artistes qui t’ont donné envie de rapper ?
Je rappe depuis bientôt deux ans. J’ai baigné dans la culture créole et j’écoute de la musique depuis que je suis née. Le premier rappeur que j’ai kiffé quand j’étais en primaire, c’était Booba avec le clip Boulbi.
Depuis que je rappe, je kiffe plusieurs rappeurs français comme Josman, Jarod, Krisy, Ninho, Take A Mic, qui ont une jolie plume et un flow très fluide qui donne l’impression que rapper est super facile !
J’ai aussi été inspirée par un rappeur haïtien qui s’appelle Wendy, qui est très très lourd. Ce que j’aime, c’est que dans chacun de ses textes, il y a une histoire et une leçon.
J’ai aussi beaucoup écouté Mac Tyer, Kery James, Psy4, mais j’écoute du rap par périodes. Ce n’est pas parce que je fais du rap que je n’écoute que du rap. À des moments, je ne vais écouter que de la soul, du Rn’B ou du compas.
Comment définirais-tu ta musique pour des gens qui ne la connaissent pas ?
Ma musique est à mon image : timide et terrible. C’est de la trap avec un flow assez lent et nonchalant, des gros kicks, de la grosse basse, j’appelle ça de la DTS (de la deep trap song).
Comment composes-tu tes morceaux ?
Avant de mettre mes textes en musique, j’écrivais déjà. Maintenant, j’essaie de plus structurer mon écriture et ma compo parce que c’est compliqué d’écrire d’abord et de trouver une prod qui va avec ensuite. Aujourd’hui, j’essaie de trouver d’abord une prod et en fonction de l’univers, j’écris et j’adapte mon flow à la prod. Je chine sur internet et les réseaux pour trouver des prods.
Je n’ai pas vraiment de méthode ou de rituel mais je n’aime pas me forcer. Je ne vais jamais me dire « je prends le thème de la voiture ou de la tristesse et j’écris dessus ». Je m’inspire de tout ce que je vois et que je ressens et j’écris en fonction de mes moods. J’ai des idées et des morceaux de phrases qui traînent un peu partout. La section notes de mon téléphone est un bordel monstre !
Tu as participé l’an dernier au concours Rappeuz. Qu’est-ce que ça t’a appris ?
C’est la première fois que je chantais devant des gens et devant un jury et c’est même la première fois que je tenais un micro. Ça m’a apporté un réseau, de la confiance et un déclic. Je me suis dit que j’avais peut-être un truc à jouer et j’ai eu envie d’y aller à fond. Ça m’a permis de partager ce que je faisais dans mon coin et de faire quelques scènes. Ça m’a sorti de ma carapace !
Tu figures sur la compilation La Souterraine Rap2filles. Comment as-tu rejoint ce projet ?
J’ai participé à un concours de freestyle sur le compte Instagram Rap2filles. Ensuite, La Souterraine m’a contactée et m’a dit qu’ils préparaient une mixtape. Ils m’ont proposé d’y figurer et j’ai dit oui direct !
En quoi est-ce important pour toi de mettre les rappeuses en lumière aujourd’hui ?
Pour moi, à partir du moment où un être humain à des choses à dire, à partager ou à apporter, il faut le mettre en lumière, que ce soit une femme ou un homme.
Quelles sont les femmes qui t’inspirent ?
Toutes les femmes m’inspirent parce qu’il y a une leçon à tirer dans toutes les histories. Mais principalement ma mère. Elle m’a eue très jeune donc je l’ai vu évoluer et faire des choix et j’étais déjà assez grande pour comprendre et voir tout ça. Mais j’ai aussi plein de potes à moi qui m’inspirent. Toutes les femmes qui arrivent à créer leur truc ou leur boîte. Il y a plein de femmes autour de moi et elles ont toutes quelque chose d’inspirant.
Te définis-tu comme féministe ?
Je ne sais même pas si je suis féministe ! Je sais juste que je respecte l’être humain et que je suis pour l’égalité des êtres. Je respecte un homme, une femme, un enfant, un bébé. On est tous libres et égaux en droits. Bien sûr, ça me révolte de voir des femmes gagner moins ou être moins considérées que les hommes, mais je me dis qu’on ne respecte pas les droits d’un être humain avant tout.
Quels sont tes prochains projets ?
Je suis en développement, du coup j’essaie de cleaner mon bordel et de mettre un peu d’ordre ! Il y a une série de freestyles qui va arriver. Je suis en train de construire quelque chose d’assez solide. J’aime bien créer la surprise, donc restez connecté·e·s et Turtle va envoyer du lourd !
Que penses-tu de Madame Rap ? Des choses à changer/améliorer ?
Franchement, pour moi, il n’y a rien à changer. Ce qui est cool, c’est que vous partagez des rappeuses de tous les horizons, c’est très diversifié. C’est super cool en un clic de savoir ce qui se passe ailleurs. Je soutiens à la mort parce que c’est lourd !